L’EFCVO est championne de France élite aux Interclubs pour la quatrième fois consécutive. Loïc Naprix brandit ici le trophée, sur le podium. (c) Photo : Franck Defrere / infostaff.fr

En ce dimanche de finale d’Interclubs, les nuages noirs ont charrié une pluie d’encre sur la piste bleue de Villeneuve d’Ascq. Une météo dantesque qui a poussé les athlètes dans leurs retranchements, en course comme en concours. Dans ces conditions dures et mémorables, l’Entente Franconville Césame Val-d’Oise (Efcvo) a conquis son quatrième titre d’affilée de championne de France élite, en devançant le Ca Montreuil (Cam) de 708 points (69 466 points contre 68 758). À la dernière épreuve, tout pouvait encore arriver. Le relais 4x400m masculin avait déjà livré son verdict, mais il restait encore le concours féminin du saut à la perche, interrompu en raison du déluge.

Coup de théâtre à la perche féminine

La perchiste Aurélie De Ryck, héroïne d’un concours de saut à la perche à rebondissements. (c) Photo : www.atni.be

Sur un sautoir à la limite du praticable, chacune des concurrentes faisait face à sa peur. La Dionysienne Amandine Dariès, qui a déjà franchi 3m51, était la plus prudente en débutant à 3m00. Passage réussi au premier essai, puis 3m20 au troisième. La première représentante de l’Efcvo était plus téméraire. La cadette hollandaise Tinka Broekman, remplaçante de dernière minute de Nisrine Dinar, commençait son concours à 3m20, alors que son record en plein air se situe à 3m40. Le clan valdoisien se tendait après son deuxième échec à sa première barre. Un ‘‘zéro’’ condamnait en effet le triple tenant du titre, mené de 138 points à cet instant (en comprenant son désavantage de 100 points du premier tour). Mais la ‘‘gamine’’ de 17 ans au visage poupon surmontait la pression et passait 3m20. À 3m40, en revanche, la jeune Broekman échouait trois fois, tandis que Dariès réussissait in extremis au deuxième essai. Dès lors, à la reprise, l’Efcvo s’en remettait à Aurélie De Ryck pour inverser la tendance. Dans un duel qui l’opposait à sa compatriote belge Chloé Henry, la représentante valdoisienne devait s’imposer avec 60 cm d’écart. Cela revenait à dépasser son record personnel à 4m20 et espérer un échec rapide de son adversaire. De Ryck franchissait 3m60 d’entrée, malgré le sautoir détrempé. Chloé Henry commettait alors l’erreur de commencer un peu haut à 3m70. À sa seconde tentative, elle échouait, se blessait au tendon d’Achille et devait jeter l’éponge. Avec ce second ‘‘zéro’’ (après la disqualification pour faux-départ d’Anaëlle Nyabeu Djapa sur 100m haies), le Ca Montreuil voyait s’envoler son septième titre depuis la création des Interclubs mixtes en 2006.

Et à la fin, c’est l’EFCVO qui gagne…

À l’inverse, l’Efcvo savourait son cinquième sacre en sept participations, par une explosion de joie. Détournant une célèbre phrase du footballeur Gary Lineker, Dominique Dufour, co-président du club, déclarait : «Les Interclubs, ça se joue à deux et à la fin, c’est l’Efcvo qui gagne !». Dans l’instant qui suivit, son sérieux était revenu. «On savait que ce serait serré et que ça se jouerait sur des détails. En 2012, à Aix-les-Bains, nous avions perdu le titre d’un point en raison d’une bulle à la perche. Cette fois, c’est Montreuil qui est passé à la trappe. Pour faire une nouvelle comparaison avec le football, disons que les tirs sur les poteaux étaient rentrants pour nous aujourd’hui, et sortants pour Montreuil. Nous sommes donc satisfaits mais lucides», précisait-t-il.

Minima olympique pour Correa

Harold Correa (EFCVO) a réalisé le minima olympique au triple saut, grâce à un sixième essai à 17m08. Photo d’archive : Julien BIGORNE / www.sportspassion95.fr

Dans le Nord, la formation valdoisienne alignait une équipe plus jeune (20 athlètes issus des catégories cadets, juniors et espoirs contre 15 pour sa rivale) privée de plusieurs piliers (Guy-Elphège Anouman en sprint, Kevin Menaldo à la perche, Jamale Aarrass sur demi-fond) et débutait avec un handicap de 100 points face au Cam. Pourtant, sans complexe, elle prenait l’ascendant dès la première épreuve. Échappant à la pluie qui ne tarda pas à suivre, Harold Correa réussissait un sixième essai à 17m08 au triple saut. Non seulement, le Franconvillois survolait le concours, mais réalisait le minima pour les Jeux Olympiques en dépit d’une piste rendue humide par les averses de la nuit. «Je savais que j’avais le minima (17m05) dans les jambes après ma prestation au meeting de Montgeron. J’avais dépassé la distance demandée de six centimètres, mais ma perf’ n’avait pas été homologuée en raison d’un vent légèrement trop favorable, à 2,2m/s. Cette fois, il n’y avait pas trop de vent, il ne faisait pas trop froid. Même si je me suis levé à 6h pour entamer ce concours précoce à 9h, je me sentais en bonne forme. Sur ce dernier essai, ma course d’élan est encore plus aboutie qu’à ma troisième tentative à 16m99 et mon ramené est réussi. Réaliser ce minima ici est un soulagement pour la suite», expliquait le protégé de Jean-Hervé Stievenart.

Record pour Quinion

Le duel EFCVO-CAM se poursuivait intensément jusqu’à la 24^e épreuve. L’écart ne dépassa jamais les 400 points d’un côté comme de l’autre. L’Efcvo prit l’avantage à la 3^e épreuve, grâce au record personnel d’Aurélien Quinion sur 5 000m marche (19’55), avant de céder du terrain au triple saut féminin et au disque masculin. Pour combler ce retard de 300 points après la 6^e épreuve, elle prit l’ascendant sur les six spécialités suivantes. Au marteau masculin, haut symbole de la lutte entre les deux clubs avec Antoine Nabialek (recrue de l’Efcvo) opposé à son frère Kevin (gros atout du Cam), le club valdoisien sonnait la charge avec la belle performance d’Idriss Barid (62m33). À la 10^e épreuve, Lamiae Lhabze (candidate aux Jo sous les couleurs du Maroc, 58’’67) et Lucile Gournet (record personnel à 60’’13) étaient sublimes. L’Efcvo n’était plus qu’à 18 points.

Fedronic en meneuse

Sélectionnée aux Championnats d’Europe, Justine Fedronic (EFCVO) a mené le 800m féminin, quasiment de bout en bout, avant d’être devancée in extremis par Clarisse Moh. Photo d’archive : Julien BIGORNE / www.sportspassion95.fr

Les 400m lui permettaient de reprendre durablement le leadership (de la 11^e à la 21^e épreuve), avec un Loïc Naprix, vainqueur et en état de grâce (record personnel amélioré de 4 centièmes, en 47’’01). Bien que battue dans les ultimes foulées par Clarisse Moh sur 800m, Justine Fedronic (sélectionnée pour l’Euro suite à ses 2’00’’64 au meeting de Palo Alto), brillait par son courage en menant seule presque de bout en bout (2^e en 2’04’’82). Yani Khelaf réalisait la meilleure performance française junior sur 1 500m (3’45’’91). Jessica Cerival dépassait les 17m au poids et reléguait Antoinette Nana Djimou Ida (ancienne championne d’Europe de l’heptathlon) à plus de 2m. Gautier Dautremer améliorait son record sur 200m (21’’13 par vent défavorable) et offrait une splendide résistance à Jimmy Vicaut. Et Jennifer Lozano remportait un 1 500m des plus serrés. Il fallait deux doublés au marteau et au javelot féminin pour permettre au Ca Montreuil de reprendre la tête à la 22^e épreuve.

Elemba Owaka frôle les 20m au poids

Franck Elemba Owaka (EFCVO) a frôlé les 20m au lancer du poids. Photo d’archives : Julien BIGORNE / www.sportspassion95.fr

Mais tout bascula une première fois à la 24^e épreuve, le 100m haies féminin. La Dionysienne Antoinette Nyabeu Djapa commettait un faux-départ, tandis qu’Audilia Da Veiga et Yariatou Touré (respectivement 2^e en 13’’74 et 4^e en 13’’93) réalisaient d’excellents chronos malgré la piste glissante. Avec 676 points d’avance, l’EFCVO disposait d’une marge de manœuvre appréciable. Heureusement pour elle, car le Cam dominait six des sept épreuves qui suivirent (de la 25^e à la 31^e). Seul le poids masculin restait sous contrôle valdoisien, grâce à Franck Elemba Owaka, sélectionné pour les Jo avec le Congo, qui frôlait les 20m. Sur les autres disciplines, un bon travail de résistance fut incarné par les jeunes Maxime Dubiez (1m95 à la hauteur) et Marion Placzek (10’01 sur 3 000m), qui battirent leur record personnel.

Durechou convaincant

Killian Durechou a de nouveau dépassé la ligne des 70m au lancer du javelot. Photo d’archive : Julien BIGORNE / www.sportspassion95.fr

À partir de la 32^e des 39 épreuves, ce fut du coup pour coup. Le revenant Guillaume Victorin (3^e de l’Euro espoir 2011 au triple saut) permit au Ca Montreuil d’être un instant en tête. Puis le lanceur de javelot Killian Durechou (tout près du minima pour l’Euro avec ses 77m61 le 16 mai à Rehlingen) remit l’EFCVO sur les bons rails en reléguant son rival direct à 17m. À cinq épreuves de la fin, soit avant les relais et l’épreuve de perche féminine, seuls 2 points séparaient les deux ténors de l’athlétisme français. Malgré ses succès sur 4x100m féminin et 4x400m masculin, le club valdoisien était mené avant la perche féminine. On connaît la suite et le coup de théâtre final.

L’EFCVO tournée vers les JO

Avec ce quatrième titre consécutif en élite, l’EFCVO a confirmé sa régularité malgré les aléas (blessures, météo difficile) et sa capacité à faire confiance à ses jeunes. Désormais, le club valdoisien se tourne vers les Jeux Olympiques de Rio. Franck Elemba Owaka, au poids, est déjà qualifié. Harold Correa a réalisé le minima olympique au triple saut et Justine Fedronic l’a frôlé sur 800m. Tous deux devront confirmer aux France et à l’Euro pour arracher leur billet. Jennifer Batu pourrait être sélectionnée, sur quota, par la Fédération congolaise au lancer du marteau. À condition de se remettre de sa blessure, Kevin Menaldo conserve toutes ses chances au saut à la perche. Blessés plus sérieusement, Guy-Elphège Anouman (relais) et Jamale Aarrass (1 500m) auront sans doute du mal à se qualifier pour le rendez-vous de Rio. Et au triple saut, Yoann Rapinier a encore 60 cm à gagner sur sa meilleure performance de la saison pour rester dans la course. Au vu de cet état actuel, l’Efcvo devrait, comme en 2012, être le club valdoisien le plus représenté (tous sports confondus) cet été aux Jeux Olympiques. Julien BIGORNE   

Les résultats complets des Championnats de France élites à Villeneuve d’Ascq >>>

Print PDF