Les marathons de l’espoir : l’aventure des Majors


CAP – L’AVENTURE DES MARATHONS DE L’ESPOIR PAR JULIEN BIGORNE

 

Sportivement, l’opération « Les marathons de l’espoir » a reposé sur un défi, entrepris et réalisé par Julien Bigorne : être le premier Français à finir en l’espace d’un an les six marathons Majors. Voici son récit :

«Cette soirée a magnifiquement clôturé la formidable opération que nous avons menée ensemble, avec le Rotary Club de Pontoise. Rétrospectivement, aller au bout de cette aventure était hautement improbable. Sans le sang-froid de mon père et la présence salvatrice de deux ballons de basket lors d’un accident de voiture qui aurait pu me coûter la vie et l’usage de mes jambes lorsque j’avais 12 ans, je n’aurai pas pu courir. Si je n’avais pas rencontré José Ferreira, un ami fidèle, je n’aurai jamais disputé et fini le marathon de Sénart en 2006. Si ce même ami, qui était l’incarnation de la générosité et de la solidarité ne nous avait pas quitté beaucoup trop tôt, je n’aurai jamais eu l’idée de refaire un marathon. Pour les dix ans de notre marathon et aussi honoré symboliquement la promesse faite 30 ans plus tôt à Saito Shimizu (mon meilleur ami lorsque j’étais petit), j’avais décidé de faire le marathon de Tokyo en 2016.

Lutter contre la mucoviscidose

Mais je n’aurai jamais pensé à faire les six marathons Majors à la suite, en l’espace d’un an. Cette idée-là a germé en juin 2015. Pour qu’elle naisse, il a d’abord fallu une merveilleuse rencontre. Avec Jérôme de Clairval, lors du 24h avec du Pontoise Mag’. Son invitation à découvrir les actions du Rcp m’a alors conduit au Trophée Karting. C’est ce jour-là, en découvrant l’énorme investissement du club Rcp et plus particulièrement de Fernando et de Stéphanie Maria, en m’entretenant durant une heure avec le Professeur Sermet et Madame Annick Morel et en écoutant l’allocution de Pablo Maria, que j’ai eu l’envie d’agir à mon tour en faveur de la lutte contre la mucoviscidose. Les jours suivants, j’ai cherché un angle original à l’opération. En faisant des recherches, j’ai alors vu qu’aucun Français n’avait réalisé les six Majors en l’espace d’un an (Sidy Diallo, référence parmi les Français à avoir bouclé les six marathons l’avait fait en 18 mois). Je me suis alors inscrit à Londres, à Berlin, à Chicago et à New-York, un an à l’avance sans être sûr de pouvoir y participer.

Les prémices à Tokyo

Fin 2015, j’avais été touché par l’accueil du Rcp. Croire au projet à ce moment-là alors qu’il avait très peu de chance d’aboutir m’avait plu. Ensuite est venu l’épisode du resto japonais, que Fernando Maria a brillamment rappelé. L’entrée du Rcp dans l’aventure du don participatif. Un grand moment. Puis vient le marathon de Tokyo, dix après Sénart. Avant même de réellement commencer, tout vacille au 29e km, lorsque je suis cloué au bitume et pris de vomissements. Heureusement que la flamme de la résistance ne s’est pas éteinte. Après 5h21’ d’efforts, je vois l’arrivée.

Début de la série à Londres

L’amitié est née avec Elizabeth Fraissenon (la directrice de Sportifs à bord / la dame qui est intervenue au début de la 2e partie de soirée). Elle m’aura accompagné sur 5 des 7 majors. Sept semaines après, vient Londres. La douleur à la cheville que je traîne depuis trois semaines s’évanouit comme par enchaînement. Fort des enseignements de Tokyo, je ne commets pas les mêmes erreurs, je gagne 50 minutes malgré un passage à vide (22e-34e km) et je débute la série. C’est lors de ce voyage que j’ai rencontré Pascal et Chantal Comte (qui ont été mes coéquipiers en septembre dernier sur les 100 km de Millau). Le 18 mai, la campagne de dons participatifs est lancée sur Fosburit. Sortie de couveuse en 13 jours. Quasiment du jamais vu sur la plate-forme. L’engouement ira crescendo ; 4 000 euros récoltés au seuil de l’été.

Le triptyque en l’espace de sept semaines

Puis arrive le triptyque en l’espace de sept semaines. Je suis bien préparé mais me rends à Berlin affaibli par une gastro. Le jour J, je débute plus lentement que prévu. Mais je passe un cap au seuil du 25e km où je faiblissais toujours jusqu’ici. Il fait plus de 25°C sur la fin et au 39e km, je ressens les effets de la déshydratation, bouche asséchée comme jamais. Heureusement que le ravitaillement du 40e km, n’était pas 400 m plus loin…Arrivée à bon port après 4h21. À Chicago, deux semaines après, c’est le tournant de l’opération. Au vu de mon expérience limitée, du très faible de temps de récup’, je me vois finir en rampant ou contraint à l’abandon. En plus, les guignes s’accumulent. Ma valise se perd à l’aéroport de Roissy et j’arrive à Chicago uniquement avec mes vêtements de course. Obligé d’acheter des affaires à 23h pour mon premier jour sur le sol américain ! Le jour de la course, je manque le point de ralliement du groupe et je dois me rendre seul dans le sas de départ. Heureusement pour moi, peut-être fortifié par toutes ces épreuves, je réalise la course rêvée. 4h16.

Et puis, juste après mon 35e anniversaire, je boucle New-York en 4h49, la course au parcours difficile dont j’avais entendu maintes et maintes fois parlé. Cerise sur le gâteau, je fais partie des 25 Français sur 5 000 sélectionnés pour participer à la parade des nations, avant l’épreuve. Une sorte de cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques pour marathoniens. À partir de là, une grande partie du chemin est faite. Je refais Tokyo avec un grand sourire (ça se voit sur le diapo !) en ayant de très bonnes sensations et sans trop puiser.

Le finish près de Kathrine Switzer

Reste Boston, le plus vieux marathon au monde, qui n’accepte normalement que des coureurs rapides, ayant effectué un chrono qualificatif. L’organisation n’accorde que 40 dossards « non-qualificatifs » aux deux agences françaises accréditées (Thomas Cook et France Marathon). Au vu de notre défi caritatif et de mon insistance (je règle la totalité des frais du voyage six mois à l’avance, sans possibilité de remboursement !), Thomas Cook me retient. Au marathon Expo (le site de remise de dossard), j’ai la chance d’assister à la conférence de Kathrine Switzer, la première féminine à terminer officiellement un marathon (50 ans plus tôt, précisément à Boston). J’ai l’honneur d’être photographié avec elle et d’obtenir une petite dédicace. La poignée de Français sur place découvre un parcours encore plus dur qu’à New-York. Le jour J, c’est le Patriot’s Day dans le Massachusetts, c’est-à-dire la commémoration de Lexington et Concord, première bataille de la Révolution américaine. La course a lieu quatre ans presque jour pour jour après les attentats de Boston. Je ressens la dimension historique de ce marathon. Les drapeaux américains sont de sortie et le public est partagé entre ferveur et grand respect pour les coureurs. Il fait très chaud jusqu’au 25e km. Je suis longtemps en mesure de boucler ce marathon en forme de montagnes russes en moins de 4 heures. Mais dans la fameuse côte d’Heartbreak Hill, popularisée par le film « Ralph », je sens que les crampes sont proches. Je force sur les gels énergétiques pour tenir. La conséquence ne tarde pas : je vomis au 34e km. Puis encore deux fois jusqu’au 39e km. À l’avant-dernier ravitaillement, je suis la tête dans le sac ! Des bénévoles me voient mal et veulent me conduire à la Croix-Rouge. En les voyant arriver vers moi, je repars d’instinct en marchant et je continue. Je parviens tout de même à finir en courant. Ironie du sort, je termine dans la même minute que Kathrine Switzer, qui est assaillie par les caméras de télévision. J’assiste de près à la scène avant de recevoir la médaille au ruban bleu des Six Majors que vous avez vue à la soirée. Voilà pour l’aspect sportif. Mais le succès caritatif de l’opération (6 000 euros récoltés en dons participatifs – un top 5 français pour un projet d’Athlé/running) est, à mes yeux, plus important encore ».